Voilà une rubrique plus intérressante. Nous aurons ici une petite séléction des titres US aux destins des plus ingrats (pour la plupart). Etouffés par le lichen Marvel/DC, ces séries sont de véritables petits joyaux. J’ai déjà parlé d’autres titres indépendants dans ma séléction des 50 indispensables comme Strangers in Paradise, Midnight Nation ou Usagi Yojimbo, il a donc fallu fouiller encore d’avantage mais le résultat est surprenant. La qualité est partout où elle se cache.
10- NOBLE CAUSES par Jay Faerber et Patrick Gleason
Jay Faerber fait parti des auteurs qui n’ont pas la carrière qu’ils méritent. Rapidement confiné à la confidentialité des lectures indépendantes, il a créé ce concept ingénieux: mélanger Dinasty et les super-héros. Liz est un fille ordinaire et l’amour lui sourit, en effet elle va bientôt se marier avec l’un des super-héros les plus populaires: Race, issu lui-même d’une famille de Super-héros hyper célèbre et surtout blindée de thunes. Liz va donc faire sa place dans ce panier de crabes. Cocufiages, secrets, enfants naturels, jalousie et mérpis, tout va lui sauter au visage lorsque son mari va subir une violente attaque pendant leur lune de miel. Cela commence par un mariage princier à la Lady Di mais la suite va s’avérer beaucoup moins agréable. Liz devra mener l’enquête pour savoir qui en veut à sa nouvelle famille tout en évitant les pièges que lui tendent de l’intérieur certains membres de sa belle-famille. Elle devra savoir lire derrière les sourires. C’est assurément le comics préféré de Stephane Bern, puisqu’on y trouve le luxe, le vice et les intrigues de cour cher à Secrets d’Histoire. Si on s’interrongait de savoir si on avait tout dit sur le Super-héros, voilà une réponse en forme de bouffée de fraicheur instantanée. Inédit en VF.
9- FALLEN ANGEL par Peter David, David Lopez et J.K. Woodward
C’est ici l’autre facette de Peter David qui s’exprime. S’il manie toujours une certaine forme d’humour décalé, il est ici plus à froid, plus noir car ce sera l’aspect mystique qu’il creusera plutôt. Car voilà, le scénariste s’interroge régulièrement sur les thèmes de la foi et de la religion. Comment telle une lumière trop forte peut elle éclairer (parfois)les gens jusqu’à l’aveuglement (souvent). Lee est une sorte de super-héroïne qui tente de nettoyer la ville irréelle de Bête Noire de la pègre et de la corruption. Il semblerait qu’elle soit plutôt une sorte d’ange déchue voguant dans un purgatoire étrange qu’un groupe nommé la Hiérarchie dirige indépendamment des « instances ». Du bar nommé « Furors », elle aide ceux qu’elle estime lésés formant une sorte d’équilibre entre les forces du bien et du mal. Les références à la bible sont assez nombreuses et bien vues. Là encore, ne cherchez pas le blasphème gratuit mais plutôt une critique ironique apposée à un réél questionnement sur la mythologie divine. Sombre, intelligent et envoûtant par son atmosphère crépusculaire. Une fois de plus Peter David provoque l’étonnement chez le lecteur. Inédit en VF.
8- BATTLE POPE par Robert Kirkman et Terry Moore
Robert Kirkman débuta avec Terry Moore bien avant le succès planétaire Walking Dead, sur cette petite série potache que nous propose les éditions Stara dans une copie dégueulasse (photocopies noir et blanc de la version couleur). Le monde est en perdition, c’est la décadence morale et même le saint-père le pape est le plus abominable des queutards ( DSK en soutane vous voyez). Mais bon, pas le choix ! Lorsque l’enfer et l’Apocalypse est à nos portes, Dieu est bien obligé de faire confiance en son représentant officiel et lui confie les pouvoirs d’un Superman en puissance. Afin de garder un oeil sur lui, il réenvoie le fiston à ses cotés. Mais bon voilà ce dernier est accroc aux jeux vidéos et possède le QI d’un immaculé conçu (Y’a pas, faut être deux!). C’est parti pour une foire absurde avec des démons, du cul, de la fin du monde, des pets, des révélations et des sushis. Délicieusement blasphèmateur, je kiffe. Ne cherchez pas non plus une charge anticléricale dedans, non on est dans le registre de sale gosse qui aime bien voir Jesus boucher les chiottes avec son divin caca pendant que le pape se tape des bimbos dans la chambre à coté. Je ne suis pas sur que ce soit vraiment cérébral…
7-DIRTY PAIR: FATAL BUT NOT SERIOUS par Adam Warren
Adam Warren fut l’un des premiers américains à revendiquer une influence « manga » dans son graphisme. D’ailleurs, influence est un doux euphémisme tant il s’applique à reproduire les moindres tics qui l ‘ont véritablement traumatisés. Visiblement, il s’immergea totalement dans la mouvance Cyberpunk des mid-ninties, portant fièrement l’étendard Shirow-Otomo-Kishiro au sein de sa reprise de Dirty Pair (Dan et Dany en VF). Dès lors cette équipe qui ne provoque que des catastrophes lors de ses missions, devient sous sa plume des bombes (dans tous les sens du terme) explosant en permanence. Warren profite également du terme « dirty » pour faire de ses héroïnes des paumées, en perpetuelle détresse sentimentale et hormonale. On part de clichés assez pompiers (la rousse incendiaire et la brune plus sage) pour renverser la tendance avec une histoire de clone, revenchard. En effet, au cour d’un festival cyber-geek, dédié au culte de leurs personnes, elles subiront une attaque assez vicelarde puisque Yuri ( la brune) sera persuadée par la suite d’évoluer dans une sorte de réalité virtuelle, détruisant tout sur son passage afin d’en sortir, ignorant que les dégâts qu’elle occasionne sont rééls. Seule Kei (la rousse)tente de la raisonner. Le duo implose donc sur cette planète subissant le typhon de leurs affrontements. Si en plus de ça, le soleil autour duquel la planète gravite donne des signes de faiblesse… Nanas sexys surarmées dans une frénésie d’action, Adam Warren nous régale tout en s’imposant en maitre incontestable du découpage hyper-dynamique des scènes de combats. Le meilleur des mondes en matière de story-telling. Un must! Sémic a publié cette aventure en kiosque depuis…
6- BAD WORLD Par Warren Ellis et Jacen Burrows
Ce n’est pas vraiment une BD en soi. C’est une compilation de faits divers les plus bizarres ayant eu lieu sur la planète. Warren Ellis exorcise ses obssessions en explorant le net pour en extraire ce qui pourrrait être le plus malsain. Les coeurs sensibles peuvent préparer leurs sacs à vomi car voilà sans crier gare un déferlement de « chicken fucking » et autres actes zoophiles, de cannibalisme, de survivalisme extrème, de satanisme rural,de croyances hétéroclites (se soigner par l’urine) et de déviances en tout genre. C’est parfois marrant tellement, c’est barré. C’est souvent malséant et toujours bien raconté, l’ami Warren sachant à chaque fois formuler les choses de manière saisissante. Jacen Burrows se contente quant à lui d’illustrer chaque brêve de manière satirique apportant un touche « esthtétique » à la chose. La conclusion qu’on pourrait avoir à la lecture de cet ovni est que « la réalité dépasse toujours la fiction ».Hannibal Lecter, Chtulluh et autres épouvantails peuvent aller se rhabiller devant l’aéropage de déglingués du ciboulot qui peuplent notre terre pour de bon. Fascinant par son coté dérangeant, jouissif par son coté transgressif. Du Warren Ellis pur Jus. Inédit en VF.
5- THE LORD OF MISRULE par John Tomlinson, Dan Abnett, Steve White et Peter Snejberg
C’est rare de tenir dans ses mains une véritable BD d’horreur prenante, qui dans une ambiance Lovecartienne parvient à tenir la route sur la longueur. C’est aussi la découverte de Peter Snejberg, dessinateur très efficace à la fois glaçant est humain et surtout très à l’aise dans l’exercice du noir et blanc (on y retrouve parfois du Comès dans ses planches). L’action se situe dans une Angleterre rurale assez intemporelle. Jake Goodfellow désirant creuser le folklore de son bled natal Callow y retourne et dans un sentiment de malaise réalise que toutes les légendes du coins sont non seulement malsaines mais ont toutes des connections bizarres avec sa vie personnelle, jusqu’à ce que sa petite amie meure brutalement. La police croit difficilement à l’innocence de Jack, le forçant à renouer avec son frangin frappadingue pour enquêter lui même sur cette affaire aux ramifications infernales. Légendes urbaines, chiens venus des enfers, fantômes historiquement décalés. Cette BD contient une foultitude d’ingrédients qui pourraient tendre vers le ridicule mais grâce à des personnages attachants, une intrigue dense où les effets se font avec « parcimonie », on obtient une ambiance particulière que Snejberg tient de bout en bout à la force des ses petits pinceaux. Inédit en France, j’eu la chance de me le faire conseiller par mon caviste…heu je veux dire mon comic dealer.
4- MURDER ME DEAD (TUE MOI A EN CREVER) par David Lapham
Frank Miller n’est pas le seul à faire dans le polar bien glauque, bien poisseux. David Lapham s’en est fait aussi une spécialité. Murder me dead est une histoire d’amour qui trourne mal, très mal. L’histoire d’une passion malsaine. L’histoire d’un couple à la Bonnie and Clyde moins la préméditation et le glamour. David Lapham sait pertinement que l’âge d’or du « noir » possède un délicieux parfum retro évoquant les fifties. Il reprend donc des codes de narration une esthétique graphique évoquant pleinement cette période. Ce qui du coup pourrait paraître naïf à l’oeil, s’avère être un choix plus qu’efficace. On entend le Jazz, on sens le tabac et on goûte le whisky avec les personnages et on plonge avec eux dans le gouffre vertigineux de leur descente aux enfers. Meurtres, dope, chantage, trahison et violence sont au rendez vous, et la manière dont ces éléments sont mis en scène particulièrement efficace dansune sorte de comics Archie totalement corrompu. Les losers n’en finissent pas de de « loser »et la sortie s’éloigne au fur et à mesure que l’on s’en rapproche. Le clou étant la scène du meutre pénible, laborieux et décomposé en phases qui mettent en exergue le coté physique de la chose. Je n’avais plus vu ça depuis le film Sang pour Sang (Blood simple) des frères Coen. D’ailleurs si adaptation cinématographique il y avait, ces derniers seraient à même d’honorer ce scénar comme il se doit. Une pépite. Delcourt l’a publié.
3- SPYBOY par Peter David et Pop Mahn.
Paru chez Dark Horse, Spyboy est un gros délire de Peter David et Pop Mahn, osant le pastiche Manga et références multiples à James Bond. Le héros, Alex Flemming possède dans sa tête l’incarnation de l’espion parfait et vit à son insu dans une famille d’espions à la retraite. Une jeune fille nommée Bombshell l’embarque soudainement dans des missions rocambolesques où son double à la fois intrépide mais aussi incontrôlable prend le contrôle de son esprit dans ces scènes d’une schyzophrénie symbolisée en « super-deformed » réinvantant par là le procédé même. Fun est le maître mot de cette série qui a connu un brève incursion sur le sol français du temps du label « angle comics« . D’abord Peter David montre par là qu’il est un vrai magicien jonglant toujours entre humour, action, idées primesautières sans oublier ses personnages. La comparaison avec l’Ultimate Spider-man de Brian Bendis saute d’ailleurs parfois aux yeux tant les ambiances lycéennes sont similaires et les répliques voisines. La fraîcheur ravigorante de ce titre colle la banane au lecteur car on peut faire de l’action avec une touche de trash sans tomber dans la sinistrose. Le graphisme est clairement orienté manga sans pour autant renier la structure propre aux comics. Le mélange des genres ne fait pas souvent de beaux enfants, mais ici le mariage est fort heureux.
2- POWERS par Brian Michael Bendis et Michael Avon Oeming
Mélanger polar noir et Superpouvoir, en voilà une idée qu’elle est bonne et ce fut l’éclair de génie de Brian Bendis qui avant de contrôler Marvel fit des étincelles avec cette petite série. Nous suivons donc,les enquêtes de Christian Walker et Deena Pilgrim flics afféctés aux affaires spéciales, c’est à dire impliquant des encapés à superpouvoirs. Evidemment l’un a des trucs à cacher et l’autre ne cesse de founier partout. Le premier arc est un simple « whodunnit? » impliquant le meutre d’une héroïne très populaire parmi la population, la fameuse Retro Girl. Le point fort de Bendis, tout le monde vous le dira, c’est la puissance de ses dialogues. Il parvient ici à rendre à la fois présente, touchante et très charismatique un personnage qui meurt dès les premières pages et cela grâce aux témoignages uniquement des protagonistes. D’ailleurs cette popularité va ouvrir la possibilité au scénariste d’un deuxième angle de vue inédit à l’époque (bien que Marvels aborde aussi le sujet), c’est la « people-isation » des super-héros. La seconde enquête (Roleplay) creusera donc l’aspect fascination que peut exercer ces surhommes sur les gens ordinaires et dès la troisième (Little deaths), la boite de pandore est ouverte: Le comics prend sur un chapitre, l’aspect d’un magazine avec pubs, interviews, flash infos etc… .La dernière trouvaille sera les incessants parallèles avec le monde de la pop-musique, les couvertures faisant régulièrement hommage aux pochettes de disques célèbres (Beatles, The Police etc…). Ainsi plutôt que de Lorgner invariablement sur La Ligue de Justice pour fabriquer une équipe d’archétypes, dans l’arc « Supergroup » l’auteur s’inspire des…Fugees. Tout cela combiné, donne un savoureux mélange et un univers très typé ne ressemblant ni à Marvel ni à DC, que les dessins « Bruce Timmesque » d’Oeming très porté sur les ombres accentue encore. Le Meilleur Bendis. Panini a plusieurs fois tenté de publier la série, sans succés, il est aujourd’hui difficile d’en trouver des volumes. Quand je vois le succés de ses Avengers, je m’interroge.
1- INVINCIBLE Par Robert Kirkman, Cory Walker et Ryan Oattley
Robert Kirkman est devenu les roi de l’indépendant, claquant la porte des majors, retournant à Image et forçant le succés avec Walking Dead, Le Maitre des voleurs, Haunt et…INVINCIBLE. Le concept fonctionne de par sa simplicité. Il reprend intelligemment les codes du genre. Mark Grayson est le fils du plus grand héros de la terre Omni-Man. Ses pouvoirs apparaissant, il pense reprendre ainsi la relève. Il devient de ce fait un habile mélange entre Peter Parker et Superman, mixant deux archétypes en un, sans qu’on ait besoin de subir des explications à la mords-moi le noeud alourdissant le propos. Le second point fort est de concentrer son univers sur sa seule série, alternant héroisme solo, en équipe ou encore dans son lycée. On passe allégrement entre cosmique, voyage dans le temps et pure criminalité. Le troisième avantage est que l’auteur prend son temps, réservant des coups de théâtre absolument renversants, rebootant son héros régulièrement au gré des envies des artistes. Là j’en vient naturellement au bénéfice absolu de ne pas subir de diktat éditoriaux. La surprise et le sentiment de danger est permanent, personne n’est à l’abri, ni parent, ni amis, ni énnemis. Kirkman défie les codes, joue avec eux, se moque des univers classiques tout en développant le sien. Il fait ce qu’il veut et c’est tant mieux. Mention pour le personnage d’Allen l’alien, absolument génial. Kirkman en roue libre pour un univers de plus en plus cohérent, INVICIBLE est devenu une véritable exception dans le paysage des Super-héros par son amour du genre, son jusqu’au boutisme et ce sentiment de grande aventure rééllement inventive.
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